Marines
Bien loin de moi, quand mon esprit me les ramène, je vois surgir les pays bleus que j'ai quittés dans le soleil qui t'éclairait, mer si lointaine où chaque soir palpite et meurt un jour d'été.
Le même essor, battant de ses ailes ouvertes le souffle chaud et les parfums qui l'ont nourri, m'emporte de nouveau vers les rives désertes où sont les souvenirs dont mon cœur s'est rempli.
Ceux-là me quitteront comme toi, mer cruelle, loin du rivage obscur où, sur le sable fin, le flot vient et s'en va, monte et se renouvelle en reflétant pour moi le ciel à son déclin.
Voici la mer et me voici, moi qui pleurais. Il n'est pas de mots pour une voix heureuse, et j'ai trop oublié pour qu'il reste en mon âme neuve un seul des fantômes perdus, il n'est pas de mots pour ne souffrir plus.
Ai-je tant souffert? J'ai voulu le croire, mais tout est mort pour un réveil nouveau et rien ne vit plus de l'éternelle histoire que je croyais garder jusqu'au tombeau. Ah! voici la mer et voici le ciel! Je vois s'avancer des vagues nouvelles et pour m'endormir dans l'ombre si belle Je regarde le sable qui dort au soleil.
Tant de choses ont pu s'en aller loin de moi, comme des heures passées, sans que je songe à leur déclin, tant de choses se sont éloignées…. Mais ce n'est pas un horizon pour mes yeux et voici l'horizon qui n'a pas de fin.
Car je veux voir enfin! Je veux sortir de l'ombre et surgir sur les hautes roches, que le soleil m'entoure et que le vent me frappe, que mon regard atteigne, avec les arbres proches, le flot le plus lointain dont l'écume s'échappe et la dernière vague au bord des flots bleus.
Et que mon cœur s'exalte! O vagues de la mer, venez avec le flot soulevé jusqu'aux rives et soyez plus puissantes sous le ciel plus clair que toutes les paroles que je pourrais dire! Depuis longtemps je vous ai appelées et vous venez, comme pour m'obéir, apportant avec vous le navire et la voile, si belles, qu'à vous voir s'en vont les souvenirs, si douces, que la nuit vous gardez les étoiles. |