Toutes les nuits de Mai (4) |
À C.C.
Te souvient-il du soir, où la première fois J’ai pris ta main tremblante et pale entre les miennes, Du soir où nous errions, cote à cote et sans voix, Écoutant la chanson des minutes sereines.
Nous avions dit ces mots qu’on ne peut pas redire Et nous nous étions fait les éternels serments, Un charme étrange et doux brillait dans ton sourire, Comme une fleur éclose aux jardins du printemps.
Notre bonheur dura plus longtemps qu’une fleur, Nous l’avons promené, durant les soirs d’automne, Dans les soleils couchants aux lointaines splendeurs, Et parmi les linceuls des arbres qui frissonnent.
Lentement je l’ai vu se faner et s’éteindre, J’ai suivi l’agonie de nos tristes baisers, Et je l’ai vu mourir, sans avoir pu l’étreindre, Dans le déchirement des promesses brisées.
Adieu donc, pour toujours, minutes éternelles, Adieu, toi qui pour moi fut l’ange des soirs gris. Je ne connaîtrai plus la douceur de tes ailes, Ni l’étrange clarté de tes yeux infinis.
Adieu, ce mot résonne ainsi qu’un long sanglot, Merci de mon bonheur, merci de ma souffrance, Oublie jusqu’à mon nom, je ne suis qu’un tombeau Où veille un souvenir plus doux qu’une espérance.
10 Avril 1907.
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